Comme soulagé d’être pris en charge

Publié le 15 avril 2020 dans News


Ce qui nous a porté, mon mari et moi, raconte Marie, sans doute la volonté, le soutien psychologique à l’hôpital et aussi le fait d’être restés, tous les deux dans la vie active. Mais cette épreuve a été lourde et compliquée, il arrivait que nous nous croisions sur le ring, l’un en provenance de l’hôpital et l’autre en partance pour être aux côtés de notre fils. Le choc encaissé violemment, avant un passage en mode pilote automatique, où l’on s’est abstenu d’avoir des émotions tant celles-ci faisaient mal, puis, enfin, une sorte de routine à laquelle on s’habitue.

Aujourd’hui, nous croisons les doigts et attendons chaque contrôle avec retenue et prudence, déclare cette maman qui ne cache pas les pleurs et la peur qui l’ont envahi, et la colère ressentie par son mari, lorsqu’ils se retrouvent confrontés à la vie à l’hôpital. Mais aussi à l’isolement de leur enfant en chambre stérile, et à la dure réalité de cette nouvelle vie.

L’isolement total
Nous pensions que nous aurions eu le choix de pouvoir rester avec Jean, d’avoir la possibilité de prendre congé pour être à ses côtés. La réalité est toute autre. Financièrement, surtout. L’épreuve nous a obligés à quitter notre logement, à vivre chez ma mère, à revoir le temps passé au travail. Grâce à la bienveillance de nos employeurs, nos temps-plein ont été réduits de moitié. Le tout ayant entraîné, aussi, le couple vers l’éloignement, sans compter l’impact émotionnel très lourd et l’isolement social qui y est lié. Inévitablement.

Le chemin a été parsemé de périodes incroyables : une course contre la montre au début où la prise en charge en urgence, à St-Luc, a fait comprendre immédiatement à la gravité de la maladie, la ponction lombaire pratiquée immédiatement, le constat terrible de 95% de cellules atteintes par le cancer et qu’il fallait anéantir, le nombre de globules blancs vingt-cinq fois supérieur à la norme, et finalement le « protocole à haut risque » que cet état a entraîné.

Un petit malade coopérant
Jean, qui jusque-là n’avait jamais connu la moindre prise de sang, en a subi dix, rien que durant la première journée de son hospitalisation. C’était incroyable comme il a réagi, se laissant complètement faire. Je pense qu’il s’est senti comme soulagé d’être pris en charge, ressentant les bienfaits, par exemple de la transfusion de plaquettes qui lui a été administrée dès son admission et lui a redonné quelques forces.

Puis, pendant quatorze mois, neuf blocs de chimio, c’est-à-dire : quatre-vingt-trois injections sans compter celles pratiquées à hauteur du liquide céphalo-rachidien, le tout au cours de séjours plus ou moins longs à l’hôpital, selon la période.
Désormais, la phase de maintenance lui permet de continuer la chimio, mais sous forme de médicaments pris oralement et à la maison. Un contrôle tous les 15 jours ne l’empêche pas de fréquenter l’école qu’il a pu retrouver en septembre dernier.

Cela dit, la maladie laisse des traces. Sur le plan physique, le bilan est assez positif, excepté quelques infections au niveau de la peau et quelques troubles digestifs, effets secondaires de la chimio. Mais c’est surtout l’impact sur le plan comportemental et relationnel de son fils qui inquiète aujourd’hui Marie. Elle qui a envie de s’investir pour ces enfants-là, comme elle dit. Il y a encore beaucoup de progrès à faire. Revenant ainsi sur cette période de vie, dont elle s’étonne d’être parfois presque nostalgique. Celle durant laquelle elle fréquentait cette unité où dix chambres étaient occupées par les mêmes patients, les mêmes familles, soignées par les mêmes équipes. Cela a créé des liens qui perdurent aujourd’hui entre certains d’entre nous. C’est comme une petite famille.

Désormais, depuis avril 2019, c’est, donc le retour à la normale et à l’école. Et, l’arrivée aussi d’un petit frère, venu élargir cette famille qui a réussi à dépasser l’épreuve et accueilli avec bonheur, voici un an, par Jean, lui que la maladie a privé de copains d’école. De copains tout court, pendant quatorze longs mois.

Frédéric Bastien


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