Philippe Delusinne : « Le Télévie fait partie de ma vie »

Publié le 22 décembre 2022 dans Moments Forts


Philippe Delusinne, qui fut durant 20 ans à la tête de RTL Belgium, dont Guillaume Collard a repris les rênes
depuis le 13 juin dernier, prendra sa retraite en avril prochain, à la fin de son mandat d’administrateur. Il
deviendra Président du Télévie.

Quel est votre état d’esprit à l’approche de ce nouveau départ ?


Très serein, parce que je crois avoir fait du bon boulot. L’entreprise a augmenté ses effectifs, ses chiffres, ses performances… De plus, grâce au Covid, j’ai bénéficié d’une sorte
de préparation à la retraite : moi qui arrivais au bureau à 7 heures chaque matin, j’ai découvert les vertus du foyer. Et, comme je l’ai dit à mes collaborateurs, je conserve suffisamment d’activités – je reste notamment Président du Conseil d’Administration de la Monnaie – pour continuer à porter ma cravate deux ou trois jours par semaine. Depuis mon premier jour de travail, je ne l’ai jamais quittée. C’est la fable de RTL !

Quand vous avez pris les rênes de RTL, le Télévie existait déjà depuis 1989. Comment le considériez-vous de l’extérieur ?

C’est pour moi une question très sensible. Mon épouse, que je connais depuis 43 ans, a perdu sa petite soeur, Martine, d’une leucémie foudroyante. Un jour de juin, elle est rentrée de l’école malade. Le médecin a cru à une angine blanche, mais c’était une leucémie. Elle a
subi une des premières greffes de moelle de l’époque, greffe qui n’a pas fonctionné, et elle est décédée au mois de novembre, il y a 42 ans. La leucémie de l’enfant nous touche donc personnellement, mon épouse et moi, et nous avons toujours soutenu le Télévie. Sur les 34 éditions, j’en ai fait 22, et j’en suis très fier !

En quoi consiste le rôle de Président du Télévie, titre que personne n’a porté depuis la mort de Jean-Pierre de Launoit, un des fondateurs du Télévie, en 2014 ?

C’est Jean-Pierre de Launoit qui m’a fait entrer chez RTL – auparavant, j’étais dans la publicité – et, quand j’ai signé mon contrat, il m’a dit : « Ce n’est pas dans le contrat, mais
vous devez me promettre de soutenir le Télévie de toutes vos forces ». Je le lui ai promis, et j’ai tenu parole : de 3 millions de recettes, nous sommes passés à 13 millions. Alors, je suis
très honoré que le FNRS m’ait demandé de succéder à Jean-Pierre de Launoit comme Président du Télévie. Pour moi, c’est un acte de foi, un engagement personnel et moral de mettre toute mon énergie et mes relations au service du Télévie.

Qu’est-ce qui explique le formidable succès populaire du Télévie ?

Tout le monde est concerné par le cancer. Tout le monde connaît dans sa famille, son voisinage, au boulot, à l’école, quelqu’un qui en est atteint. C’est pourquoi le Télévie a
un tel succès. En plus d’apporter de l’argent à la recherche, c’est un fabuleux liant social : chaque initiative locale pour récolter des fonds – une balade à vélo, un repas de quartier,
une brocante… – crée du lien entre les gens. De plus, le Télévie a sorti le mot cancer de son ghetto. Il y a 40 ans, quand on avait un cancer, on s’en cachait. Aujourd’hui, on en parle et, de plus en plus souvent, on s’en sort. La leucémie de l’enfant guérit dans 92% des cas, alors qu’à l’époque de Martine, on comptait 65% de décès.

Au cours de vos 21 ans comme CEO, y a-t-il un moment Télévie dont vous vous souvenez particulièrement ?

L’an dernier, à 89 ans, ma maman s’est découvert un cancer du poumon, alors qu’elle n’avait jamais fumé. La maladie étant déjà très avancée, elle a décidé de ne subir ni intervention chirurgicale ni chimiothérapie, mais de mourir dignement chez elle. Quelques semaines plus tard, le 19 septembre, à la soirée de clôture du Télévie, j’ai dit au micro : « Je pense à ma mère qui me regarde ». Le lendemain, j’ai été la voir, comme chaque jour, et elle m’a dit combien elle était fière de moi. Elle avait regardé jusqu’au bout : l’infirmière qui passait la nuit auprès d’elle me l’a confirmé. Mais, à midi, elle est tombée dans le coma, et elle est morte le soir même, dans mes bras. Alors oui, le Télévie fait vraiment partie de ma vie…

Comment fonctionne la collaboration RTL-FNRS ?

C’est plus qu’une collaboration : une symbiose. Au sein de la maison RTL, Philippe Jaumain, notre Brand Communication Director, fourmille d’idées pour donner un nouveau souffle au Télévie, qui a quand même été mis à mal par le Covid. Et au FNRS, l’équipe Télévie est sur tous les fronts pour gérer l’opération au quotidien avec les équipes de RTL. Et puis, il y a aussi, Arsène Burny, le Président de la Commission scientifique Télévie, une figure emblématique : les gens l’adorent. À cause du Covid, le record de 13,3 millions d’euros,
atteint en avril 2019, n’a évidemment pas été battu, mais tout l’argent récolté, jusqu’au moindre euro, va à la recherche. C’est-à-dire aux chercheurs, qui sont là avec nous, à la soirée de clôture, avec leur tablier et leur logo du Télévie… Nous avons mis la recherche en
phase avec les gens qui donnent.

Qu’avez-vous envie de dire aux bénévoles que le Covid a démobilisés ?

Je voudrais leur dire que nous avons plus que jamais besoin d’eux. Ils ont été les premiers frustrés de ne pas pouvoir vendre des bonbons à l’hôpital, organiser une kermesse de quartier ou programmer une activité sportive. Mais c’est à nouveau possible ! Alors, reprenez vos contacts, reformez vos comités, refaites-le ! Parce que le Télévie, c’est vous !

Journaliste : Marie-Françoise Dispa


D'autres news